José Manuel Fajardo
Marre des films à l’eau de rose de Noël ? Alors, lisez Haine, le dernier roman de l’auteur espagnol José Manuel Fajardo, publié aux éditions Métailié en 2021. Deux vies y sont mises en parallèle : celle de Jack Wildwood, artisan et propriétaire d’un magasin de cannes à Soho, Londres, au XIXe siècle, et celle de Harcha, jeune homme grandi en banlieue parisienne qui cherche à échapper à sa situation au XXIe siècle. Tous deux sont en désaccord avec la société dans laquelle ils vivent : ils haïssent.
Haine est un livre qui plonge les lecteur·rice·s dans une ambiance hostile ; un récit qui oblige à revoir les mécanismes constitutifs de notre société occidentale sous la lumière douloureuse de deux moments charnières de son histoire. Une confrontation à la fois avec notre passé et avec notre présent. À travers ses protagonistes, le roman examine la haine grandissante dans l’esprit humain. Un sentiment qui cache derrière lui un phénomène social, celui-ci dépassant les limites de l’individualité pour se répandre sous forme de violence dans le corps collectif. Deux événements mêlant fiction et réalité sont ici mis en perspective : la série de crimes commise par Jack l’Éventreur en 1888 à Londres, et la terreur djihadiste de l’année 2015 à Paris.
Le récit de Fajardo nous rappelle que l’exclusion sociale n’est pas un problème récent et que, malgré les distances temporelles et/ou géographiques, elle se reproduit systématiquement au fil des siècles. Et si dans ce passage du temps, les discours et les formes d’expression de l’exclusion se renouvellent et s’adaptent au milieu, c’est moins parce qu’ils se transforment que parce qu’ils réitèrent et répètent le même fond.